Une des vocations de notre entreprise théâtrale est le va-et-vient permanent entre les textes contemporains et "classiques". C'est pourquoi après avoir travaillé sur un des auteurs les plus représentatifs de la langue et de l'esprit français, à savoir MARIVAUX avec deux spectacles, nous avons voulu nous promener vers une langue plus contemporaine et un univers plus poétique. Notre choix s'est porté sur Yannis RITSOS, un des plus grands poètes grecs contemporains, reconnu comme tel par ses pairs du monde entier et entre autre par Aragon. L'œuvre de Ritsos est imprégnée de la culture grecque classique mais dans un langage et un univers poétique contemporain. Nous avons donc monté et produit ISMÈNE que nous avons joué tout au long du mois de juillet 1999 au théâtre du Nord-Ouest à Paris. Ce travail nous a plongé dans les fondements même du Théâtre bien que la mise en scène de Gérard Malabat ait été résolument contemporaine.
Le choix d'un retour aux "classiques" grecs s'est donc imposé de lui même. Il nous fallait aborder la tragédie antique.
Par ailleurs la représentation de la femme est un des thèmes récurrents des mises en scène de Gérard Malabat, comme en témoigne son travail sur L'EPREUVE de Marivaux et ISMENE de Ritsos. La femme, manipulée par l'homme. La femme, témoin muet et impuissant de l'Histoire. Jusqu'à présent elle était une victime passive de l'égoïsme masculin. Dans MÉDÉE la victime se révolte, use de ses pouvoirs et se sauve elle-même en faisant le pire des sacrifices : l'infanticide.
D'autre part Gérard Malabat aborde ici un nouveau sujet non moins contemporain : celui de l'étrangère. MÉDÉE reniée par son père à cause de son amour pour Jason. Rejetée elle devient une exilée, une émigrée. Ce thème-là sonne curieusement actuel.
Enfin, et c'est là que la continuité du travail sur Ritsos se cristallise : Euripide recherche la définition d'un équilibre entre les droits des citoyens et ceux de la cité ; et son œuvre exalte la responsabilité des hommes face aux dieux, à la cité et à eux-mêmes. C'est une tragédie humaine.
Avec LA JEUNE FILLE ET LA MORT d'Ariel Dorfman nous avons désiré aborder le thème de la justice. Une fois de plus l'héroïne est une femme. Une femme qui se bat pour que justice soit rendue aux survivants des crimes contre l'humanité.
VIRGINIA WOOLF, explore également le thème de la femme. Qui se cache derrière cette grande romancière anglaise ? Sa vie est nimbée d’un halo de mystère. Ses dépressions, sa folie, son suicide… Tout semble converger pour faire de cette femme une héroïne tragique. Qui a peur de Virginia Woolf ? Beaucoup de monde. Qui l’a lue ? Beaucoup moins. Il faudrait commencer par ses livres sans jamais avoir entendu parler de sa vie. Ignorer la légende pour découvrir sa vérité. Commencer par la fin dans l’espoir de découvrir le début…
La dernière création de Gérard Malabat, KAREN BLIXEN raconte la vie d’une autre femme du début du XXème siècle. Elle fut « non pas un écrivain, mais une conteuse d’histoires », l’un des écrivains qui s’adressent à l’humanité toute entière. Sa vie dans une Afrique paradisiaque encore offerte à toutes les aventures témoigne que la vie et l’art de Karen Blixen ont été « Deux coffrets fermés à clef dont chacun contient la clef de l’autre »